Médecine Amazonienne

Médecine Traditionnelle Amazonienne


(Dessin ci-dessus) Crédit Geens Archenti Flores

Dans bons nombres de médecines alternatives, la dégradation de l’état physiologique du patient est causée à l’origine par des désordres d’ordre psychologiques ou affectifs. On peut citer par exemple l’ouvrage de Lise Bourdeau  » Le Mal a dit « . Pour la médecine amazonienne, la santé du corps et de l’esprit est indissociable. L’observation des symptômes physiques, des troubles psychologiques et mentaux, de l’état émotionnel, est envisagée de façon globale comme une série de phénomènes ayant pour origine un désordre énergétique. En effet selon eux, l’homme est composé d’énergies que représentent sa condition animale, son mode d’alimentation, ses rapports sociaux et affectifs, ses croyances,… Il représente une somme énergétique qu’il convient de libérer, de canaliser, d’harmoniser et d’aligner. Bien entendu, leurs conceptions des énergies et de celles de l’homme en particulier diffèrent de la vision occidentale. Elles reflètent évidemment leurs cultures et leurs traditions, mais elles sont surtout liées au référentiel symbolique et au matériel cognitif que leur apporte l’Ayahuasca.

Les visions qu’elle procure comme nous l’avons vu précédemment dans les effets de l’Ayahuasca, sont des outils de diagnostic utilisés par ces guérisseurs depuis des milliers d’années, ceci peut d’ailleurs donner un aperçu du degré d’affinité que ces peuples ont avec cette médecine. Ces communautés détiennent une connaissance et des clés de lecture d’un monde spirituel et sensoriel riche de sens, à même de guider le voyageur expérimenté vers le but de son voyage. Ainsi pourrait-on dire lors d’un soin individuel par exemple, le guérisseur va cheminer à travers ses visions, dénouer, nettoyer et ré-équilibrer les « énergies » affectant l’individu, grâce à son expérience et à l’énergie de ses icaros (chants sacrés), ce qui aura pour conséquence un ré-alignement du corps et de l’esprit. L’effet thérapeutique sur le corps physique et psychique étant la résultante de ce ré-équilibrage énergétique.

«…Il faut au contraire admettre qu’il existe, dans la psyché, des choses dont nous ignorons tout ou presque, et qui possèdent au moins le même degré de réalité que les choses du monde physique, que nous ne comprenons pas non plus en dernière analyse, mais qui affectent nos corps de la façon la plus conséquente. Aucune recherche affirmant que son sujet n’avait pas de caractère propre ou n’était un « rien que » n’a jamais apporté la moindre contribution à la connaissance…»

C.G. Jung

La Médecine Amazonienne et les Plantes

Guérisseurs récoltant la Chacruna

Afin de comprendre ce qu’est la médecine traditionnelle amazonienne, essayons de nous figurer ce que représentent les plantes maîtresses pour les peuples du bassin amazonien. À savoir que l’Ayahuasca est appellée communément « la madre » (la mère), le tabac étant considéré par certains comme le père, et ainsi de suite,…

Il faut comprendre que les plantes sont perçues par les peuples amazoniens comme des parents du monde spirituel, avec lesquels ils peuvent communiquer. Indissociables de la nature et des plantes  qui les entourent, ils sont parvenus à tisser des liens avec elle, et ont façonné tout une science médicinale.

Si les cosmologies diffèrent entre les communautés, les plantes qu’ils utilisent et les rapports qu’ils entretiennent avec elles sont sensiblement les mêmes. Cela est dû en grande partie aux échanges fluviaux inter-tribus pratiqués depuis toujours. Sans ce « partage » du savoir et des plantes médicinales, la médecine traditionnelle amazonienne n’aurait pas pu se développer et se transmettre encore de nos jours. Une valeur importante à garder à l’esprit lorsqu’on cherche à s’initier à cette médecine.

Médecine Traditionelle de l’Ayahuasca

Préparation d’Ayahuasca

L’usage médicinal traditionnel de plantes « enthéogènes » comme l’Ayahuasca mène l’utilisateur à un état modifié de conscience. Enthéogène selon la racine latine « théos » – Dieu, signifie se convertir en dieu en dedans, être possédé par dieu, ressentir dieu. En ce sens elle permet de se reconnecter à notre âme. L’Ayahuasca permet de toucher du doigt ce qu’il y a de sacré dans l’homme. Elle ravive l’énergie de vie et réveille la part divine inhérente à chaque être humain. Pour les peuples amazoniens, l’utilisation de l’Ayahuasca est une manière de vivre en pleine conscience, comme de véritables êtres humains. 

L’Ayahuasca sublime les sensations, les sentiments, développe l’intuition, ouvre les portes de l’imagination, et permet d’entrer dans un monde spirituel magico-religieux. Depuis des millénaires, les anciennes cultures indigènes et leurs guérisseurs utilisent cette méthode de transe non addictive sans perte de lucidité, pour traiter diverses maladies, interroger le monde qui les entoure, aller à la racine des problèmes et recouvrer la santé. L’Ayahuasca appelée « liane de la mort » est considéré comme une « petite mort » qui nous amène à passer par une étape de destruction des routines de vie, des vices, des illusions de l’égo, des fausses croyances, pour illuminer notre conscience, couper les dépendances, guérir les relations, afin de devenir fort et pleinement réalisé.

Interview of a Shipibo healer speaking about Ayahuasca

Icaros et chants Sacrés

Crédit Juan Carlos Taminchi

L’icaro ou (chanson chamanique) renferme un sentiment, une conscience et le pouvoir de guider les participants lors de la cérémonie d’Ayahuasca dans l’abîme des visions. L’icaro soigne protège et guide le patient dans la transe du soin. Chaque plante maîtresse a sa médecine et ses icaros. Lorsque le guérisseur se connecte à l’énergie de ses plantes, il reçoit leur pouvoir de guérison et leurs mélodies qu’il canalise en un chant énergétique : l’icaro.

Il existe deux types d’icaros, les icaros en langage humain et les icaros en langage non humain. Les icaros humains sont chantés dans les langues des peuples natifs : shipibo, quechua, ashaninca, machiguenga,… Ils sont un héritage de mélodies, de techniques et de connaissances transmises par les guérisseurs de génération en génération. Les langages spirituels non humains sont un language profond composés de sons inintelligibles faisant référence à des sons de la nature accompagnés de mélodies inédites que le curandero canalise comme un message empreint d’une forte dose de sentiments. Ces icaros n’ont aucune traduction en language humain mais ont une grande portée émotionnelle et une indéniable valeur thérapeutique. 

Extract of an icaro sung by a shipibo healer

La Diète

La Diète

La Diète telle que les natifs amazoniens la conçoivent ne correspond pas à la définition de la diète vue en occident en tant que simple régime alimentaire. À l’origine les peuples natifs entamaient une « Diète » pour se soigner de maladies ou pour subvenir aux besoins de la tribu en devenant guérisseurs ou chasseurs,… La Diète est une méthode d’apprentissage qui consiste à se connecter à l’énergie d’une plante afin de recevoir sa force, son pouvoir et ses connaissances. Pour le chasseur ou le pêcheur, la Diète lui permettait de développer ses instincts, de dissimuler son odeur, et de déceler la présence des animaux. Le guérisseur lui entamait un apprentissage afin de recevoir le pouvoir guérisseur des plantes, leur connaissance des remèdes, et leurs icaros.

La Diète consiste principalement en la préparation et la prise d’une ou plusieurs plantes maîtresses administrées selon un dosage précis et prescrites pour une période définie par le guérisseur. Elle s’accompagne de restrictions alimentaires et comportementales afin de poser un cadre thérapeutique bénéfique au processus de soin ou d’apprentissage. Si vous souhaitez en savoir plus sur les Diètes de soin ou d’apprentissage cliquez sur le lien suivant Diète de plantes maîtresses

La Purge

Il est courant avant d’entamer un processus de soins (cérémonie d’Ayahuasca et Diète de plantes) que le guérisseur donne à son patient un purgatif. Il en existe plusieurs comme le Tabac que l’on préparera sous forme de décoction, les graines de Piñon blanco seront toastées puis ingérées, le bulbe de l’Azucena broyé et dilué, etc…Ces plantes sont des toxiques, vomitives et laxatives qui doivent être savamment dosées et administrées par un guérisseur compétent. Il est conseillé de boire beaucoup d’eau tiède afin que la purge puisse s’effectuer en profondeur, toujours sous la supervision du guérisseur. 

La médecine traditionnelle amazonienne envisage le traitement d’un patient sous ces différents angles : physiologique, psychologique, affectif, émotionnel, énergétique … La purge représente une phase indispensable au processus de soin car elle agit sur tous ces aspects à la fois visant à décharger le patient, afin de le préparer pour la cérémonie d’ayahuasca et permettre aux plantes de travailler en profondeur. À l’issue de la purge, il se peut que le patient nécessite encore un peu de nettoyage. Grâce à l’Ayahuasca connue pour ses propriétés purgatives, le nettoyage pourra éventuellement se poursuivre lors des cérémonies.

« Men sana en corpore sano . Un esprit sain dans un corps sain. »

Juvenal

Bains de Fleurs et Bains de Vapeur

Bain de Fleur

Afin d’aider le patient dans son processus, le guérisseur va lui administrer des soins sous forme de bains de fleurs. Les bains de fleurs sont composés de plantes maîtresses (il peut s’agir de feuilles ou de fleurs odorantes) et parfois d’eaux de Cologne (ex: Agua de Florida). Il est conseillé de ne pas se rincer après s’être baigné avec le bain de fleurs de façon à ce que l’énergie des plantes pénètre profondément le corps du patient. Les bains de fleurs sont utilisés assez fréquemment avant les cérémonies d’Ayahuasca pour calmer le mental et préparer le corps à recevoir l’énergie des soins. Enfin, n’oublions pas que l’Ayahuasca est une porte d’entrée au monde spirituel des plantes. Comme les hommes, les plantes sont sensibles aux bonnes odeurs !

Bain de Vapeur traditionnel

Les bains de vapeurs entrent aussi dans les soins administrés par les guérisseurs. Composé de plantes bouillies, le bain de vapeur va pénétrer le corps en profondeur et provoquer une sudation, afin d’éliminer les toxines du corps. Les bains de vapeur ont de tous temps été pratiqués de par le monde, que ce soient dans des huttes ou dans des hamams. Ils sont surtout utilisés en cas de fièvre, d’affections bronco-pulmonaires, d’arthroses, de douleurs musculaires, d’états fébriles, etc… pour évacuer le froid retenu dans le corps.

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